lundi 4 février 2013

Disgressions sur l'Inde...


Il y a 65 ans que Gandhi Père de la nation a été assassiné.

Le Père de la Nation est extrêmement apprécié et respecté. Il faut dire qu'un petit homme comme ça avait une telle conviction et volonté, qu'il est arrivé, par sa campagne "Quit India" à ébranler l'Empire puis à mobiliser tous les indiens autour de la construction d'une Nation. Malheureusement, il n'a pu éviter la Partition avec le Pakistan. 

Ses récits auto-bibliographiques sont à lire. Ils ont inspiré tant de dynamiques en Orient et en Occident.


Tandis que maman (après la parenthèse Auroville) se ré-acclimate au bruit, à l'effervescence, au stress, à nous recompter... Papa et Maguelone se félicitent d’être en Inde…

REFLEXIONS  DIGRESSIONS ET EMOTIONS SUR L'INDE 

Il y a un proverbe missionnaire qui dit : "Lorsqu’un étranger arrive dans un pays, après deux jours, il écrit un livre, après 10 ans, il écrit un article, après une vie, il n’écrit plus rien".


Nous n’avons pas la prétention de comprendre quelque chose à l’Inde. Jacques, rencontré au Bangladesh et qui y a passé plus de 20 ans nous disait qu’il ne comprenant toujours rien. 5.000 ans d’histoire à l’échelle d’un sous-continent, c’est évidemment trop pour toute une vie.


Nous nous contentons donc des odeurs, des regards, des images, des rencontres, des moments de partage… sans trop vouloir généraliser mais avec une envie d’y vivre et de nous y plonger durablement.

Un écrivain arrive toujours à formaliser mieux que quiconque ces impressions. Nous empruntons donc à Pascal Bruckner, auteur que nous apprécions beaucoup pour son sens « politiquement incorrect », les quelques digressions suivantes, parues dans son livres, « Les Parias ».

Pages choisies 

Une Inde imaginaire, fantasmatique autant que réelle, aimée autant que détestée et sur laquelle chacun projette sa peur, son enthousiasme, ses doutes ou sa colère. 

Une Inde dont les démesures et la misère n'effacent jamais la séduction magique, quasi merveilleuse qu'elle exerce sur tout étranger.

Aprés le tuk-tuk d’extrême Orient, c'est le pays du "RICKSHAW", un taxi-scooter pétaradant, aux sièges défoncés qui nous emporte à grand train à travers la ville, zigzaguant entre les bus, les camions, les vélos et les bovins en vadrouille couchés à même la chaussée.

La FOULE une douzaine de races se coudoie, se mélange, commerce dans les langues les plus étranges sans compter le flot des cyclistes, les carrioles médiévales, les triporteurs et toute la ménagerie habituelle des ânes, chèvres, chiens et vaches. 

Les BAZARS dégorgeant sur les trottoirs: des mètres d'étoffes aux teintes vives, des piles de comestibles et d'épices, des grappes de pantoufles aux batteries d'ustensiles en aluminium.

Dans une coulée de piétons coiffés de turbans, de voiles, de calottes blanches, de châles, un grouillement d'individus aux pupilles noires indéchiffrables.

Partout cela brille, scintille jusqu'aux taches rouges sang de bétel qu'hommes et femmes crachent inlassablement.

CUISINE ET RESTAURANTS : 

Savez-vous pourquoi les restaurants indiens sont si peu éclairés? Dans un pays où presque la moitié de la population souffrent de la faim, le repas en public prend allure d'acte clandestin. On se dérobe à la vue, on ripaille dans l'ombre. Pour exemple un "vegetable thali" est une réunion de 40 spécialités de la cuisine végétarienne sur un plateau de cuivre voisinent, dans des coupelles, des parterres de carottes, de concombres, de choux fleurs, de navets, de courgettes, de tomates, de lentilles noires, du riz blanc, deux godets de curry et un paquet de galettes de froment brûlantes et fumantes. Les tons foncés des sauces, pareilles à des confitures qui varient du rouge bordeaux au miel doré élèvent la table au rang de Tour de Babel, un raccourci coloré de MOTHER INDIA. Les plats étant petits, il faut y piocher tour à tour, doser de nombreuses saveurs et non se limiter à l'uniformité d'une sensation unique. Lorsque jusqu'à présent on a gouté de l'Inde que son thé et ses fruits soigneusement pelés aller plus loin apporte la tempête jusque dans nos systèmes digestifs !

Dans cette société très stratifiée, la cuisine représente un contre-modèle. Le système assigne à sa naissance et à sa caste, tandis qu'elle dit les joies du métissage, du mélange. Le curry symbolise l'Inde parce qu'il rassemble sous son toit tant de religions et de peuple divers. L'épice est un lubrifiant qui accélère la digestion et fédère les aliments, non sans les dissimuler... Dans ces ragoûts se mijotent d'étranges conspirations. On vous cache tout ce que vous mangez dès lors que les ingrédients ont baigné des heures durant dans un masala. Ici, pas de cette franchise puritaine de la cuisine euro-américaine qui doit toujours décliner son identité, son poids, son origine, sa date de naissance avant d'être jugée comestible.

Au contraire des pays démocratiques, en Inde on mêle les denrées parce qu'on sépare les hommes.

La religion reprend vite ses droits. Toutes les castes ne mangent pas les mêmes plats.

Division entre cuisine moghlai et cuisine du sud, entre le grillé et le sauté qui recoupe l'opposition entre l'islam et l'hindouisme. La brochette, le kebab, est l'apport d'une religion avide de simplicité et de clarté à l'inverse du curry, lequel privilégie la confusion et le camouflage ou chaque mastication devient une devinette.

C'est un incendie qui commence aux lèvres, se propage aux organes et ne s'éteint jamais tout à fait car le lendemain, l'épice se venge encore et se rappelle à votre bon souvenir. Des saveurs qui imprègnent, imbibent la peau et l'organisme des mangeurs. C'est pourquoi tant de vieux hindous sentent la coriandre, le safran ou la cardamone. 

N'oubliez pas que l'on mange qu'avec la main nue, la main droite uniquement, la table devient un temple : en avalant ces trésors parfumés, on communie avec l'univers.

RELIGIONS

Visites d'un temple sikh où des gaillards en turban et robe mousseline se prosternaient devant un livre noyé sous les jasmins et les œillets; à un temple hindou où des brahmanes onctueux et gras tentaient de soudoyer des dieux grimaçant; jusqu'à la Grande Mosquée où des milliers de fidèles, tous en blanc, se jetaient avec discipline le front à terre... Partout éclatait l'orgueil d'appartenir à la vraie foi. La multitude des idoles chez les hindous renforçait la hantise du Dieu invisible chez les musulmans.

SADDHU, moine hindou qui vise un idéal détachement vont par les routes, en bandes, à demi nus, le corps couvert de cendres, les cheveux laqués de bouse  de vache. SANNYASIN en robe ocre, shivaïtes armés d'un trident, fakirs musulmans en pagne et turban, yogis émaciés l'impression de traverser la cour des miracles.

Mais toujours tant de femmes magnifiques aux saris multicolores et ces enfants souriant de leurs dents blanches.

Nous ne savons trop penser d'un pays qui, à chaque pas, vous jette ensemble le chaud et le froid, la splendeur et l'outrance en pleine figure.

L'Inde vous impose sa beauté comme un fardeau, aux plus nobles panoramas se superpose quelque vision effrayante, placé là pour vous rappeler à dessein la lourdeur de certaine destinée.

En Inde, le scandale est la même chose que la perception. Voir s'est s'indigner.

La laideur est uniquement urbaine, mêmes indigentes, les campagnes ne dégagent pas l'épouvante noirâtre des grandes agglomérations. Le cœur de l'Inde authentique bat dans les villages.

LANGUE ET ANGLAIS :

L'unité linguistique n'existe pas, la diversité des dialectes crée de véritables frontières d'Etat à Etat. En plus d'un accent marqué, très particuliers qui nous décomplexe en nous laissant perplexe sur la compréhension et parfois dans un anglais impeccable qui souligne les déficiences du notre...

LA VUE :


Spectateur-né les indiens vous matent, vous dévisagent et vous questionnent de leurs accents si particulier ! Et pour autant nous pourrions nous balader chacun avec un pot de chambre sur la tête, tout le monde s'en foutrait…

La photo étant le prolongement de l'œil : c'est 20/30/50 voire 100 fois par jour selon les endroits plus ou moins touristiques que l'on nous demande toujours très poliment d'immortaliser nos faciès... Les deux garçons s’y plient plus difficilement, mais on aime échanger ces sourires…

L'ODORAT : 

Les effluves d'encens, de curry, d'épices, de graillons, d'urine réduite à l'essence d'ammoniaque, de jasmin, de parfums, odeurs stupéfiantes, affolantes se combinant pour en produire de nouvelles, toujours inoubliables, comme si un alchimiste s'amusait à faire des expériences avec vos narines... ».