vendredi 28 juin 2013

Riga et son splendide patrimoine Art Déco

L’histoire de la Lettonie au XXème siècle a été tragique. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, elle est tour à tour occupée par les russes, en 1940, - 15.500 Lettons sont alors déportés dans les goulags - puis, en 1941, par les Allemands – 15.000 juifs lettons seront alors exterminés par les sauvages Einsatzgruppen, à travers l’épouvantable Shoah par balles.

La Shoah par balle est relativement moins connue en Europe de l’Ouest parce qu’elle a sévi plutôt sur le front Est. Créés dès l’Anschluss, les Einsatzgruppen - unités allemandes mobiles – avaient comme mission de tuer tous les opposants à la politique d’assimilation allemande, tout particulièrement les juifs, les tsiganes, les handicapés et les différents fonctionnaires et l’élite locale… Le nombre de victimes de ces tueries de masse est estimé entre 1.000.000 et 1.400.000..

Après son annexion en 1944 par l’URSS, la Lettonie connaît une phase de répression stalinienne qui enverra près de 2% de sa population dans des camps en Sibérie. Les autorités soviétiques lanceront en même temps une phase de russification intensive.


La Lettonie acquiert son indépendance en 1991, avant l’effondrement de l’URSS, puis après une période difficile du fait du sevrage avec l’URSS, elle rebondit assez bien pour figurer aujourd’hui parmi les bons élèves de l’UE. Elle devrait adopter l’Euro l’année prochaine.

Comme ses voisins baltes, entre 1991 et 2011, le pays a perdu presque un quart de sa population à cause d’un taux de fécondité extrêmement faible et un solde migratoire négatif.

Nous apprécions particulièrement cette ville avec ses splendides bâtisses Art Déco du début du siècle. Les plus belles sont l’œuvre du père du glorieux cinéaste russe, Eisenstein ! Sacrée famille !



L'Art déco est un mouvement artistique né au cours des années 1910 et qui a pris son plein épanouissement au cours des années 1920 avant de décliner à partir des années 1930. Il fut extrêmement vivace surtout dans les Arts décoratifs, l'architecture, le design, la mode et les costumes, mais concerna en fait plus ou moins toutes les formes d'arts plastiques. Il est le premier style à avoir eu une diffusion mondiale. Sans leader véritable ni théorie, ce style fut critiqué dès ses premières années pour sa superficialité. Il était particulièrement employé pour tous les édifices devant valoriser l'image de son commanditaire ou évoquant les loisirs : l'architecture commerciale (boutique, siège social, etc.), les théâtres et cinémas, mais aussi l'architecture domestique (le décor servant de signe de distinction sociale). Touchant d'abord les classes les plus aisées, il se propagea rapidement dans l'ensemble du corps social et devint très populaire.  (Sources Wikipedia).


La ville a su préserver ce patrimoine exceptionnel, un des plus riches du monde !

Riga c’est aussi pour nous, les retrouvailles tant attendues avec Bonne Maman (Mam’s) et le filleul Nicolas, venus nous retrouver pour nos derniers jours de voyage… Les enfants attendaient ce moment depuis quelques semaines.

A peine débarquée, Mam’s veut déjà tout voir… Riga est déjà trop petite ! Infatigable, elle enchaine les monuments, guide à la main et elle a toujours une anecdote à raconter aux enfants. Merveilleux !


Le lendemain, nous partons en bus local, à 70 km de Riga, découvrir le superbe château baroque de Rundale, magnifiquement restauré : un petit Versailles, dessiné en 1736 par le même architecte que l’Hermitage de St Petersburg, un italien bien sûr, Rastrelli, pour qu’un conte retrouve discrètement sa maitresse russe, qui n’était autre que l’impératrice Anna Ivanovna ! Splendide et romantique ! 





lundi 24 juin 2013

Tallinn l’hanséatique…


Nous prenons donc à Moscou, le train direction Tallinn (14 heures). Nous passons la nuit dans des sièges assis. Timothée s’endort épuisé dans la dernière valise ouverte qui nous reste ! La nuit et courte mais le passage de frontière est assez facile. Nous rentrons « chez nous », dans l’espace Schengen. Sacrée invention Schengen et l’Union Européenne !

Après l’immense Russie, notre périple se poursuit en train et bus donc entre les capitales européennes des pays baltes puis Varsovie et Berlin.



L’Estonie est indépendante depuis 1991. Leur révolution a été pacifique et chantante ! Les innombrables chansons en Estonie appartiennent au patrimoine culturel. Elles ont survécu aux multiples occupations au cours de l’histoire estonienne (occupation danoise, russe, suédoise, polonaise ou allemande). Elles avaient donc été « tolérées » par le régime soviétique. En 1989-1991, les Estoniens se regroupaient donc sur les places publiques pour chanter et demander… l’indépendance. Astucieux ! Qui pourrait interdire des dizaines de milliers de personnes qui chantent leur patrimoine de façon pacifique… Avec les deux autres pays baltes, la Lettonie et la Lituanie, ils ont formé une chaine humaine de 600 km et de 1,5 million de personnes pour demander le départ des russes. Les images ont fait le tour du monde et à la chute de l’URSS, L’Estonie devient « gaiement » indépendante.

Ils ont intégré très rapidement l’OTAN, l’UE, Schengen et l’Euro ! C’est actuellement un des rares bons élèves européens en matière de croissance et de dépenses publiques. Avec un taux de taxation le plus bas d’Europe, ils continuent à attirer quelques investisseurs. Ils connaissent cependant un solde migratoire négatif malgré un chômage assez faible et une incontestable qualité de vie !

Leur langue est très proche du Finlandais, dont ils arrivaient à écouter, en cachette et à leur risque et péril, les radios et télévisions pendant l’occupation soviétique. Helsinki est seulement à 80 km de Tallinn. Leur hymne national est d’ailleurs le même que celui de Finlande, avec des paroles en plus !

Peuplée de 1,3 million seulement, l’Estonie est « l’E-country » par excellence. Le Wifi est disponible, même en pleine forêt et ils sont les inventeurs et développeurs de Skype (ce qui explique ce nom étrange et difficilement prononçable !).

 
Seulement 13% se disent luthériens, 12% orthodoxe (minorité russe) et le reste se revendique athée. Sur Tallinn, dans le centre ville classé au Patrimoine mondial de l’humanité, les plus beaux les plus grands bâtiments sont les églises des différentes confessions !

Tallinn est petite, entourée de beaux remparts, très bien conservée malgré des bombardements russes en 1944 (elle était alors occupée par la Wehrmacht). C’est une ancienne cité hanséatique. Cette incroyable ligue de commerçants du Nord de l’Europe, qui date du XII au XVIIè siècle, est l’ancêtre du Marché commun ! La croissance de la ligue hanséatique a lieu dans un monde où colonisation et évangélisation vont de pair. Elle est particulièrement liée à la montée des Chevaliers teutonique, ordre militaire chrétien.

Ligue hanséatique et royaumes teutoniques

Nous profitons avec bonheur de ces marches dans une ville pittoresque. Nous louons aussi vélo et trottinette locale… L’intrépide Augustin se « mange » un abri bus, trop curieux d’admirer de beau jumeaux en poussette ! Vélo crevé et plus vraisemblablement cassé.        On fini donc les derniers kilomètres les uns sur les vélos des autres, avec d’autres belles chutes sur le chemin ! On accroit donc notre belle collection de « bleus ». Formidable !
Maman pendant ce temps  visitait et priait dans les églises de Talinn.

Pour découvrir le reste du pays, nous louons un minibus et nous partons à l’Est (Parc National de Laheema) et le lendemain à l’Ouest pour constater l’incroyable respect du pays pour son patrimoine naturel et pour nous plonger dans la Baltique, pas aussi fraiche que le lac Baïkal. Les enfants se régalent… et les Estoniens aussi. Ces plages étaient rigoureusement fermées au public pendant l’ère communiste… Il y avait donc, tout autour de cette Baltique, un autre rideau de fer, sur les plages.
 

Nous avons la chance d’être dans les pays baltes pour la Saint Jean, véritable fête millénaire fériée dans les trois pays baltes. Nous assistons donc, dans un splendide musée traditionnel en plein air, au immense feu de bois de la Saint Jean, autour duquel, évidemment tout le monde… chante !

 




jeudi 20 juin 2013

Déambulations à Moscou (suite et fin...)

Churchill, qui avait un goût évident pour la formule disait : « La Russie est un secret, enveloppé d’un mystère qui dissimule une énigme ! ».

Aujourd’hui, on peut s’étonner qu’après avoir dominé le monde pendant un demi-siècle, la Russie, malgré les incroyables ressources naturelles et l’incontestable qualité académique de sa population, soit encore relativement peu intégrée au commerce mondial.

Un observateur, a d’ailleurs proclamé : « C’est le seul peuple au monde qui s’achemine résolument vers le XIXème siècle ». C’est probablement sévère, mais il faut chercher d’éventuelles frottes de frottement dans cette double tension qui anime l’histoire russe depuis plusieurs siècles : l’occidentalisme, plus perméable, plus ouvert aux idées européennes, caractérisé par Saint Petersburg et le slavophilisme plus national et plus présent à Moscou. D’un côté le regard est tourné vers l’Ouest, de l’autre vers l’Orient avec des milliers de kilomètres de profondeur.

Au niveau économique, la Russie souffre d’un sacré handicap qui est son très faible taux de natalité (1,3 par femme). Malgré son immense territoire, la population russe vieillit et diminue, ce qui est probablement aussi un indicateur de doute dans l’avenir.

Cinq jours à Moscou ne suffisent bien évidemment pas pour approcher ce mystère mais nous visitons cette immense ville dans les meilleures conditions. Il fait beau et chaud. Les routes sont très larges, les enfants peuvent enfin courir, les voitures respectent le code de la route, ils sont silencieux… No stress !

Idéalement situé sur la Moskova, la ville a été plusieurs fois incendiée et détruite (notamment par les Mongols et par la Grande Armée de Napoléon, qui a été bien punie puisqu’elle a été décimée pendant cette campagne où elle a perdu 90% de ses effectifs !).

En 1712, le tsar Pierre le Grand transfère sa capitale à Saint Petersburg mais après la prise de pouvoir par les Bolcheviks, Moscou est redevenue la capitale de la Russie mais aussi de toute  l’U.R.S.S. Elle a été un des centres du monde pendant près de 50 ans !

Staline voulait en faire une ville à la gloire du communisme. Il a profondément remodelé cette ville. Il fit donc raser la plupart des bâtiments anciens, monastères, églises, cathédrales pour y construire de gigantesques bâtiments, de larges avenues, des gratte-ciels et un métro recouvert de marbre.





Pour nous donner une idée de l’influence qu’a exercée cette capitale, nous courons à l’université de Moscou, gigantesque campus qui héberge… 40 facultés. Cette université, dominée par un immense gratte ciel a accueilli et formé une bonne partie des leaders du XXème siècle et notamment beaucoup de tiers-mondistes.





La visite du Kremlin demande une demi-journée pour profiter de ces trois incroyables cathédrales : la cathédrale de l’Assomption qui abrite les patriarches russes ; la cathédrale de l’Archange qui a couronné tous les tsars et qui accueille leurs tombes et enfin la cathédrale de l’Annonciation qui était la « cathédrale privée » de la famille des tsars. Toutes les trois ont des iconostases différents et d’une richesse inimaginable. Il faudrait des heures pour mesurer et apprécier chaque icône… Nous passons comme tous les autres touristes beaucoup trop vite…

On se demande pourquoi, Terminator Staline, n’a rien détruit de tout ce patrimoine religieux, alors qu’il logeait et gouvernait à quelques mètres ? Mystère de l’histoire !

Nous prenons le temps d’apprécier la très riche galerie Tretiakov qui regroupe la plus grande collection d’icônes russes dont la très célèbre « Trinité » de Roublev. Il s’agit d’une collection qui a été acquise par un particulier pour en faire don au pays. Sacré mécénat !

Les enfants marchent sans se plaindre… pendant que Maguelone continue à composer son Brevet des Collèges pour son deuxième et dernier jour ! Le soir, nous offrons aux filles le Ballet du Kremlin bien mérité pour un merveilleux Giselle. Les filles sont épatées par le nombre de musiciens et de figurants dans ce ballet classique. Belle initiation à la danse dans ce cadre.

Le lendemain, nous allons au fameux cirque Nikoline de Moscou, du nom d’un célèbre clown russe Les numéros sont assez classiques, sauf un incroyable final avec des éléphants. L’ambiance est dans la salle pleine. Les russes aiment vraiment le cirque. Nous aussi !

Entre temps, les parents se sont offert le fameux café Pouchkine, le meilleur de la gastronomie russe, dans un cadre majestueux, sur plusieurs étages et notamment au milieu d’une splendide bibliothèque.

Avant de quitter cette Russie que nous avons tant appréciée, papa part visiter à une cinquantaine de kilomètres de Moscou, le « Vatican orthodoxe russe », le monastère de Serguïev Possad.
Ce fabuleux complexe a été fondé en 1340 par le saint le plus vénéré du pays, Saint Serge de Radonège qui a contribué à la victoire définitive contre les Tatars. Il est depuis le saint patron de la Russie. Les cours intérieures sont pleines d’orthodoxes venus prier et intercéder et de touristes… venus les photographier ! L’ambiance n’est pas vraiment au recueillement !


Ce soir, nous prenons le train, en 3ème classe, pour Tallinn… avec une furieuse envie d’approfondir cette culture et la découvrir à d’autres moments de l’année. 









lundi 17 juin 2013

Cyril et son pote Méthode, copatrons de notre Europe !

Ce voyage c’est aussi l’occasion de découvrir plein d’autres alphabets : alphabet khmer, laotien, thaï, birman, bengali, sanscrit, tibétain, hindi, urdu, pictogrammes chinois avec les différentes langues et nuances et aujourd’hui cyrillique !

Augustin, qui découvre cette année ses premières lettres, est totalement perdu et nous aussi !

Pays où l'on parle de cyrillique
Un peu d’histoire (merci Wikipédia): le terme alphabet vient des mots grecs alpha et béta, dérivés eux-mêmes des deux premières lettres de l’alphabet originel phénicien (Xème siècle avant J.C.)… qui a lui-même inspiré l’alphabet latin et l’alphabet arabe. Retour historique, pour nous, à la caser départ et à notre Liban d’adoption, toujours à la croisée de différentes civilisations !

Combien il y a-t-il d’alphabets dans le monde ? Il faudrait diviser les alphabets vivants et ceux des langues mortes… les phonèmes, les pictogrammes… Bref, en fait, on n’en sait pas trop. 

L’alphabet cyrillique rayonne sur une dizaine de fuseaux horaires et couvre un bel espace géographique (Russie, Serbie, Monténégro, Macédoine, Bulgarie et anciennes républiques de l’URSS comme la Mongolie). Il est utilisé par 200 millions de personnes. Il a été créé, en Bulgarie, vers la fin du IXème siècle par Constantin Cyrille (Saint Cyril) et un de ses disciples, à partir de l’alphabet grec. Donc sa création précède le schisme de 1054 qui a durablement divisé le christianisme !

Avec l’entrée de la Bulgarie dans l’Union Européenne en 2007, l’alphabet grec est devenu donc le 3ème alphabet officiel de l’UE avec le latin et le grec ! Et saints Cyril et Méthode ont été proclamés co-patrons de l’Europe ! Unis dans la diversité !

Brevet des collèges à Moscou…

Monastère Novodevitchi
Aujourd’hui, le 17 juin, Maguelone doit passer son Brevet des Collèges. Elle a revu tous les fondamentaux avec papa (et lui aussi, qui avait oublié les cosinus et sinus et autres Pythagore !) après cette année d’apprentissage en totale autonomie. Pas vraiment stressée la frangine ! Tant mieux !

Papa l’accompagne jusqu’à sa salle de composition… Retour nostalgique quand il était encore « plein d’espoir et plein d’avenir ! », genre « moi, ma fille, à ton âge ! »…  « Bon, papa, je crois que tu y aller, maintenant ». 
Cathédrale de Slomlensk

Il profite de sa journée pour découvrir le superbe monastère Novodevitchi et son imposante cathédrale de Smolensk avec ses fresques du XVIème siècle. Quelle extraordinaire beauté mais quel dommage que ces nombreux lieux de cultures ne soient plus utilisés que comme musées, comme si le temps s’était arrêté en 1917. Pourquoi aujourd’hui, tous ces édifices religieux, si vivants, si remplis d’histoire sont vides et inanimés, alors que la foi orthodoxe vit, semble-t-il, un renouveau ?

Juste derrière ce bâtiment protégé par des remparts et un beffroi, le petit cimetière accueille de nombreux personnages illustres de l’histoire russe, (Gogol, Tchekhov, Prokofiev, Eisenstein…).

Le cimetière respire bien sûr la sérénité ! Ici la statue d’une employée modèle soviétique côtoie celle d’une danseuse étoile ! Il y a même Boris Eltsine qui s’y est fait enterré en 2007. Sa tombe est un peu dans la « démesure », comme le personnage d’ailleurs, ancien apparatchik devenu démocrate...

On passe devant l’hôtel Moskva. Il y a trente ans, lorsque le pays n’acceptait que peu de touristes, il fallait impérativement descendre dans cet hôtel ou à l’hôtel Cosmos aux chambres à 100 USD. Pour papa et Benoit, c’était une somme hallucinante avec leur portefeuille épuisé par plusieurs mois de voyage en Asie… Avec deux américains rencontrés dans le transmongolien, ils avaient préféré chercher ailleurs mais aucun hôtel n’acceptait de prendre le risque d’héberger des étrangers (c’était en septembre 1991, l’URSS sera dissoute en décembre). Ils ont fini, par dormir une partie de la nuit dans… un taxi moscovite qui faisait qui faisait marcher le compteur !

Tombe de Boris Elstine
La petite histoire raconte que les plans du bâtiment de cet hôtel mythique avaient été présentés à Joseph Staline. Il y avait alors deux propositions. Ne comprenant pas qu’il y avait deux plans distincts, il les approuva toutes les deux. Les constructeurs n’osant pas lui signifier son erreur construisirent donc les deux projets : une moitié de l’hôtel est dans le style constructiviste et l’autre dans le style stalinien… En 2003, l’hôtel a été détruit comme beaucoup d’autres bâtiments soviétiques, puis racheté par une chaine américaine, Four Seasons, qui l’a reconstruit… à l’identique… L’histoire bégaye !


Découvrir Moscou, c’est aussi l’occasion de prendre le métro et de se faire… fracasser le genou ! Le métro est vraiment superbe avec ses 150 stations si profondes et gigantesques. Certaines d’entres elles sont de véritables chefs d’œuvre en marbre, fresques et ornements dorés. Aucun tag, bien sûr… « L’œil de Moscou » veille ! Il faut cependant prendre garde aux portillons automatiques qui fracassent les genoux des resquilleurs… Une barrière métallique lourde s’abaisse automatiquement avec beaucoup de violence… Papa en fait la mauvaise expérience ayant mal introduit son billet ! Pavlov et son fameux réflexe conditionnel était bien russe. La fois suivante, il sollicite l’une des innombrables personnes qui surveillent ! 

Total... ement original




Flamme au soldat inconnu de la Grande Guerre Patriotique







Réveil sur la Place Rouge…

« Réveil sur la Place Rouge ! »… Ça pourrait ressembler à un titre d’un livre de la collection SAS !

Après ces longues heures dans le transsibérien, nous arrivons dans une des sept grandes gares de Moscou à 4 h 41 du matin… Cinq heures de décalage horaires depuis Irkoutsk ! Le train est à l’heure, à la minute près, malgré ces 5.500 km au compteur… Ironie de l’actualité, c’est aujourd’hui  qu’un navigateur français vient de battre le record de la traversée de l’Atlantique sur la même distance en plus de 5 jours ! Christophe Colomb doit apprécier !

Le splendide métro moscovite n’ouvre que dans une heure… Nous décidons donc de prendre enfin l’air et de marcher jusqu’à la Place Rouge… Nous rencontrons alors le monde de « l’after », au petit matin, après une nuit de fête pour un ultime café ou un dernier verre de vodka. Maman sourit ! Ça lui rappelle des souvenirs qu’elle hésite à nous raconter ! A la même période, papa nous assure qu’il sortait, à la même première heure du petit matin, après une de ces nuits d’adoration à Montmartre… Hum ! Hum ! On fait semblant de le croire !... (« Père Benoist, il faut nous confirmer cette info ! »).

Cathédrale Saint Basile

Les rues sont vides, juste animées par les fêtards bien imbibés qui rentrent en titubant chez eux. Pas vraiment sûr qu’ils y arrivent dans cet état !

Toute la tribu marche lentement, les yeux encore endormis pour se réveiller à 6 h 00 du matin sur la Place Rouge ! Fabuleux de se retrouver ici après plus de 10 mois de voyage, sur la grande place qui a dominé le monde pendant quelques décennies du siècle dernier, pour le meilleur et pour le pire… Les parents sont émus !

Il faudra attendre encore quelques heures pour que les musées ouvrent… Nous nous incrustons dans une messe orthodoxe à la cathédrale de Kazan, détruite par Staline et reconstruire depuis. Magnifique iconostase, superbes chants. Les instruments de musique ne sont pas tolérés dans la liturgie orthodoxe qui repose sur ces longues litanies et chants polyphoniques superbes… mais communion refusée… dommage ! L’œcuménisme a encore du chemin à faire dans tous les sens !

Epuisées, elles s'endorment à table ! 
Découverte du Kremlin extérieur et du quartier de Kitaï-Gorod avec ses nombreuses églises et monastères. Les enfants ont leur surdose de monastères, temples et églises… Bon alors, papa essaye « Eh, et si on allait voir Lénine ? ». Pas vraiment plus de succès ! Les parents ne se voient pas se battre pour imposer une visite au mausolée du fondateur de l’URSS ! Et puis, préférer Lénine à Basile le Bienheureux, y’a une grand-mère qui s’en remettrait pas !


Pour se faire pardonner de cet interminable pèlerinage, on leur offre un dîner dans une grande chaîne américaine de restauration rapide, dont nous n’osons même pas prononcer le nom… et tout ça à deux pas du Bolchoï. Beaucoup plus de succès ! Décidément, nous vivons le choc des cultures !

Magasin Goum : autrefois très populaires, et maintenant très "bobo"


Cathédrale de Kazan


Le Bolchoï

mercredi 12 juin 2013

A la conquête de l’Est… La fabuleuse épopée du transsibérien !

Grâce aux œuvres romanesques et cinématographiques américaines, tout le monde connaît, la conquête de l’Ouest, par le rail en Amérique du Nord avec son cortège de héros, de massacres et de découvertes. Mais peu de personne connaissent l’extraordinaire aventure et épopée du transsibérien, autrement plus impressionnante !

En effet, il s’agit d’un des plus grands ouvrages humains et ouvrages humains jamais construits…


L’isolement de la Russie sur elle-même, à partir de 1914 – guerre de 1914 puis révolution Bolchévique – a longtemps laissé méconnu cet exploit industriel et technique hors norme.

De la décision en 1892 à sa réalisation finale en 1907, la voie de chemin de fer la plus longue du monde a été construite en quinze années seulement avec ses 6.500 km, plus de 3.500 ouvrages d’arts, un millier de gares, détourner des rivières et des fleuves, créer des centaines de villages de colonisation qui deviendront des villes au cours du XXème siècle…

Les difficultés ont été énormes. Il a fallu drainer des marécages dans toute la Sibérie, aplanir de vastes vallées dans l’Altaï, créer des ponts sur les fleuves les plus larges du monde, dynamiser des montagnes et faire face à la pénurie de main d’œuvre – ces régions étant le plus souvent inhabitées.

Les travaux commencent, en 1892, simultanément des deux extrémités à Ekaterinbourg et à Vladivostok. En 1898, la ligne venant de l’Ouest atteint déjà le Lac Baïkal, énorme défi technologique.


La France - grâce au succès du livre de Jules Vernes, Michel Strogoff - s’intéresse particulièrement à la Sibérie et à cette conquête et lui donne une place de choix lors de son Exposition universelle de Paris en 1900 avec la reconstitution d’un wagon-restaurant. Les usines Eiffel contribueront ainsi à cette aventure en fournissant quelques ponts et armatures métalliques.

Les problèmes de ravitaillement et d’hygiène sont durs. Une telle rigueur entraine inévitablement une défection du personnel. Il faudra faire appel aux forçats en leur promettant de réduire de moitié leur peine !

En attendant, l’achèvement du tronçon, les autorités décident de faire traverser le train dans un énorme bac à vapeur, brise glace, fabriqué et livré en pièces détachées par l’Angleterre.


Mais la guerre de 1905 avec le Japon, rend cette ligne absolument stratégique. On décide alors de faire rouler le train sur les glaces du Baïkal, tiré par des chevaux !

En 1907, la jonction est enfin faite…

En France, un jeune étudiant, Albert Thomas, a gagné comme 1er prix un voyage avec les Wagons Lits et emprunte pendant une dizaine de jours cette ligne mythique. Il sera un des rares témoins de cette entreprise. L’ironie de l’histoire, c’est que cet homme sera ensuite élu député, très impliqué sur l’essor du rail en France puis Ministre des équipements en pleine guerre de 1914-18… Il finira directeur général du BIT (Bureau International du Travail), nouvellement créé.

Après 1917, la Révolution Bolchévique rompait avec la tradition européenne de la Russie, qui se tournait d’abord vers « sa » Sibérie et vers ses différentes régions à « civiliser ». La Sibérie va se peupler progressivement. Les communistes vont apporter aussi l’électricité avec le transsibérien et rendre vivables certaines régions avec leurs importantes ressources naturelles.

Le transsibérien est la véritable épine dorsale de la Russie qu’on peut traverser aujourd’hui sur 9.298 km en 6 jours et demi !

Nous, de notre côté, il nous faudra juste 3,5 jours, puisque nous rejoignons la ligne seulement  Irkoutsk, après plus de 1.500 km sur le Transmongolien… Nous avons compté que depuis plus de deux mois, nous avons fait plus de 13.000 kilomètres en train depuis Uruqmi, à l'extrême Ouest de la Chine... 

Transsibérien câlin !

80 heures pour 5.500 kilomètres. Les enfants adorent et ils ont été très patients. Les haltes sont très courtes, juste le temps de se dégourdir les jambes  Papa qui avait fait ce trajet en 1991 avec son frère Benoit nous raconte qu'en fait, à cette époque, ils n'avaient pas le droit de descendre sur les quais et que le wagon restaurant était toujours "out of stock", à cause du marché noir. Le train était, à l'époque constitué de quelques wagons vides qui servaient aux polonais  allemands de l'Est, russe, mongols ou chinois pour y faire transporter toutes les marchandises vendues dans les autre pays du Comecon !

Les paysages sont assez monotones : taïga, steppe et marécages et grandes forêts de bouleau et de sapins. 

Tout au long, nous traversons des petits villes ou village. Le paysage est malheureusement bien abîmé par de nombreuses usines ou exploitations minières. 

Le soir, les parents expérimentent l'amitié russe autour du rituel de la vodka... Impossible de refuser avant trois verres bien remplis. Hips !

Le transsibérien restera un magnifique moment familial : "transsibérien, le temps des câlins !" disent les garçons !