jeudi 20 décembre 2012

Bangladesh, divine surprise sur notre route...



Notre amie, Valérie, nous avait prévenus et elle nous avait encouragés à y aller. Elle est une des cadres volontaires d'une ONG de développement, Eau et Vie. 

Voir site : http://www.ong-eauetvie.org/


Le Bangladesh est assez éloigné des clichés et perceptions traditionnels.

Bien sûr, son indice de pauvreté est un des plus bas du monde, bien sûr un tiers de sa population vit sous le seuil de pauvreté, bien sûr c'est le pays le plus densément peuplé au monde, bien sûr il y a un incroyable trafic dans les villes...


Géographiquement, l'essentiel du Bangladesh est occupé par le delta du Gange et du Bramapoutre. C'est une plaine fertile mais sujette aux cyclones et inondations des moussons. 

Mais il faut aussi reconnaître que le Bangladesh c'est aussi :

  • Un des derniers pays créés dans le monde, 1971, doté d'une réelle maturité malgré une naissance si douloureuse et dramatique...
  • Des frontières stables et reconnues entourées de l'Inde et de la Birmanie et à quelques centaines de kilomètres de l'autre géant asiatique, la Chine...
  • Une coexistence plutôt pacifique entre les communautés, hindouiste qui sont restés après la partition, musulmans, écrasante majorité et quelques chrétiens et bouddhistes...
  • Une démocratie affirmée, malgré un système politique complexe et militant... souvent violent...
  • Une femme Premier Ministre dans ce pays, 3ème pays musulman dans le monde...
  • La plus longue plage du Monde, dans la péninsule de Teknaf (120 km)...
  • Plusieurs parcs naturels et de protection de l'environnement...
  • Les plus grosses ONG du monde... dont la fameuse Grammen Bank, fondée par Mohammed Yunus, prix Nobel de la Paix...
  • Un des pays les mieux préparés dans le monde en matière d'éducation et de prévention de risques et catastrophes... (Pour un même cyclone d'une même force et intensité : 400.000 morts en 1970, 150.000 morts en 1991 et 3.000 morts en 2007). C'est évidemment encore trop mais ces "progrès" cachent un immense travail de préparation et de prévention que peu de pays ont développé à ce stade (Japon, Cuba mis à part).
  • Un des rares pays "on track" pour atteindre la moitié des objectifs du Millénaire de lutte contre la pauvreté...
  • Une gestion relativement sous contrôle des fanatismes religieux, malgré le triste et dramatique épisode de l'exil de Tasmareen Xxx. voir site : http://fr.wikipedia.org/wiki/Taslima_Nasreen
  • Une activité économique étourdissante notamment dans le textile...

Et puis, le Bangladesh c'est d'abord un sens de l'hospitalité unique, confirmé par tous les expats rencontrés et par notre propre découverte avec le projet RUPANTAR à Khulna.





Une glorieuse histoire jusqu'à la Partition

Le Bangladesh c'est d'abord le Bengale avec son immense culture, chantée par Rabidranah Tagore : la période bouddhiste (Vème avant JC), le retour de l'hindouisme (VIème) ; l'empire Moghol et l'arrivée de l'Islam (XIIIe-XVIII) ; la colonisation britannique (à partir de 1757) , la résistance du Bengale après le choix en 1912 de Delhi comme capitale de l'empire des Indes au lieu de Calcutta ; la Partition et l'accès à l'Indépendance du Pakistan oriental...



L'âge d'or du Bengale, après l'empire Moghol, c'est le XVIIIème siécle où la région exportée son coton et sa soie dans le monde entier.

Il faut se souvenir de la lutte victorieuse mais trop tardive de Gandhi contre la manufacture cotonnière des Britanniques qui sont arrivés à détruire toute la filière du Bengle. Gandhi a imposé ensuite à l'Inde indépendante le rouet sur son drapeau pour lui rappeler son histoire et cette lutte. 

La douloureuse et tragique Partition entre l'Inde et le Pakistan (Oriental et Occidental) le 15 août 1947 avec son cortège de massacres et de déplacement de populations marque la première naissance du pays. Lire le livre : "Cette nuit la liberté" de Larry Collins et Dominique Lapierre.

Une naissance dramatique

Assez vite, les bengalis ne se retrouvent pas dans les programmes de la Ligue Musulmane de Jinnah qui privilégie la partie occidentale du Pakistan.


Karachi, la capitale des Pakistans, est à 1,700 km du Bengale, sans continuité territoriale !



La révolte prend la forme d'une reconnaissance de spécificité de la langue et de la culture Bengalie, à travers la création du "language mouvement" dans les années 1950's. L'Ourdou avait été déclaré langue officielle de tout le Pakistan.




Le personnage du Sheikh Munib Rahman, peu connu en Europe, qui a adopté le style Gandhi" a aussi beaucoup contribué à l'émancipation et l'organisation de la résistance. Sa victoire aux élections et son arrestation (25/03/1971) par Karachi a été le signal de l'action de l'insurrection armée. Un jeune major Zia se joint à l'insurrection et prend Chittagong.


La guerre de "libération" débutait avec son cortège d'atrocités : meurtres des étudiants, lynchage d'hindouistes, exode massif vers l'Inde de millions de personnes...

Un gouvernement en exil s'installait en Inde. Après une attaque de l'armée pakistanaise sur le territoire indien, l'armée indienne entre dans le Pakistan Oriental et en prend le contrôle.  
L'armée Pakistanaise dans sa retraite massacre le 12/12/1971, 250 intellectuels et journalistes.

Le 14 décembre, la guerre est finie avec la reddition pakistanaise. Le bilan est impitoyable : neuf mois de guerre, un million de morts et des millions de déplacés (une partie des hindouistes qui avaient fui les massacres reviendront s'installer au Bangladesh, comme la famille de Kortik, notre ami de Rupantar).

Les criminels de guerre pakistanais n'ont jamais été poursuivis. La plaie est profonde et les relations avec le Pakistan sont inexistantes et très tendues.


Les premiers pas du Bangladesh

A sa libération, le charismatique Sheikh Mujib s'est avéré un piètre politicien qui sera assassiné en 1975 avec tous les siens sauf deux filles dont l'une deviendra Premier Ministre. 


Plusieurs coups d'Etat se succèdent jusqu'à la prise du pouvoir en 1978 puis par les élections libres par le major Zia qui s'était fait connaitre par la prise de Chittagong pendant la guerre de libération. Zia essaye alors d'organiser le pays mais sera à son tour assassiné en 1981. 
Son vice-président va lui succéder assurant une période de stabilité. La veuve de Zia, va conquérir le pouvoir en 1991 mais les élections suivantes seront boycottées par l'opposition.


La filles rescapée du Sheikh Mujib, Sheikh Hasina, gagne les élections en 1996 et signe des accords de paix avec les rebelles du Nord du pays. C'est la première Premier Ministre a effectué son mandat complètement.


Depuis deux partis, le BNP et la Ligue Awani se partagent tour à tour le pays entrecoupé par des Coups d'Etat.


Actuellement, Sheikh Hasina est au pouvoir mais son mandat se termine en 2013 et la tension monte. 

Malheureusement et malgré d'indéniables progrès, le pays est considéré comme le plus corrompu au Monde (d'après Transparency International).

Le système politique en cours a fait long feu. Lors de notre bref séjour, il y a eu cinq jours de grève générale organisées par cinq partis différents !

Malgré cette histoire récente conflictuelle, le pays connaît une croissance de 6-8% sur ces dix dernières années, ce qui fait rêver nos démocraties avancées !