Malgré toutes nos appréhensions, la longue étape à Calcutta
(10 jours) s’est avérée une des plus intéressantes du parcours.
Nous sommes rentrés de Darjeeling en avion, le 2 janvier, tous
les trains étaient complets. Une dernière soirée avec Norbert sur Calcutta,
pleine d’émotions.
Les échoppes devant le temple de Kali |
Grâce à notre précieuse amie, Sybille, nous sommes hébergés
dans deux très grandes chambres de la Tomorrow
Foundation, au dernier étage de la YMCA
(prononcé par les filles : « Moi,
j’aime skier ! ».). Souvenez-vous de la chanson des Beatles et de leur
chorégraphie kitsch ! Les clips ont bien évolué : les corps des
chanteurs se sont recouverts de tatouages, le déhanchement est plus affirmé et se dénudent plus facilement !
Cette Guest House date de 1861. C’est la plus ancienne YMCA
de tout l’empire britannique ! Et effectivement, on l’impression qu’elle
n’a jamais évolué : la tuyauterie, les meubles, les ventilateurs… et même
un staff adorable mais d’un autre âge !
Nous sommes vraiment heureux de disposer de ces très grandes
chambres avec chacun son lit et d’une cuisine. Nous donnons sur une des plus
importantes rues de Calcutta (Nehru Street, assez bruyante (mais ça nous permet
de moins culpabiliser des cris de Timothée !) et nous profiterons certains
soirs du Maiden, immense étendue
verte que les anglais ont légué à Calcutta, juste en face du Victoria Memorial.
Toute la journée, et surtout en soirée, des milliers de personnes
déambulent sur cette esplanade, au milieu des jeux de cricket. Ce sport nous étonne toujours. On se souvient d’une
blague qui disait que « c’était un
sport pour les anglais, qui leur permettait de continuer à bavarder tout en
prenant l’air, juste après le thé et juste avant le whisky ! ». C’est certainement une de ces nombreuses blagues
françaises anglophobes !
Les règles du cricket sont complexes. Malgré notre intérêt,
personne n’est arrivé à nous les expliquer simplement. Les matchs passent en boucle sur les chaines
indiennes. Certains matches peuvent durer 5 jours. C’est tout un peuple qui communie
avec enthousiasme et ferveur. Nous, les non-initiés
nous avons l’impression que seulement 3-4 personnes jouent, les autres sont en
alertes. Incontestablement, il y a beaucoup de classe, de grâce et d’élégance.
C’est un jeu de gentlemen qui s’est
vraiment popularisé. L’inde, le Pakistan et le Bangladesh sont parmi les
meilleures équipes du… Commonwealth !
Entrée du mouroir à Kalighat |
Le lendemain, de notre arrivée, nous visitons avec les 3
filles, le temple de Kalighat, épicentre de toute la ville et qui accueille le
mouroir de Calcutta, fondé par Mère Theresa ; Vives moments d’émotions
pour papa qui se souvient de ses brefs engagements, trois années de suite, dans
cet endroit il y a plus d’un quart de siècle !
Cette émotion sera encore plus intense quelques jours plus
tard lors de la visite dans la maison mère des missionnaires de la Charité qui
héberge la tombe de Mère Térésa. Papa avait rencontré très brièvement la Mère,
avec un ami, Antoine, devenu prêtre du diocèse de Paris.
Tombe de mère Térésa |
Sa tombe est sobre.
Une petite exhibition, sans prétention, retrace sa vie, ses combats contre la
pauvreté, ses fondations. Sa chambre minuscule, où elle a passé plus de 50
ans ! Partout, règne une atmosphère de grand recueillement. Un matin, de
bonne heure, les parents assisteront à la messe, avec plus de 200 sœurs et des
dizaines de volontaires. Papa se souvient de la position de Mère Térésa, en
tailleur, discrète, silencieuse, tout au fond, minuscule personne, dotée d’une
volonté si puissante. L’humilité d’une petite dame au service de la grandeur
d’une œuvre ! A méditer !
Découverte des projets de la Fondation Tomorrow
Dans l’après-midi, nous visitons le premier des projets de
la Fondation Tomorrow où nous sommes
accueillis par la merveilleuse Saswati. Nous prendrons beaucoup de plaisir à visiter,
au cours de la semaine, deux autres leurs projets et à participer à leur pique-nique
annuel de toute l’équipe, tellement animé, où les rires ont fusé pendant toute
la journée. Cette gaité était communicative et les enfants ont vécu, une de
leur plus belle journée.
Cette fondation indienne intervient dans le domaine de
l’éducation. Les projets touchent des classes particulièrement démunies, avec
un accent important sur le handicap. Le passionnant directeur Ritwik, souffre
lui-même d’un handicap des membres inférieurs. Il a pu étudier et voyager. Son
rêve est que Calcutta devienne une ville « deseable friendly » ! Il nous apprend que son adaptation
dans ce monde très hostile et souvent indifférent aux handicapés a été
facilitée grâce à quelques professeurs et directeurs d’écoles qui exigeaient
systématiquement que Ritwik soit intégré dans tous les jeux qui se faisaient
dans les cours de récréation. Aucun jeu de balles n’était accepté si il n’était
pas intégré dans les matches. Ainsi, il est devenu goal ou joueur de basket.
Belle leçon de volonté et d’intégration !
Nous passons avec les trois filles, quelques heures dans un de
des deux bus mobiles du projet Chairabeiti.
Ce bus s’installe dans des poches de pauvreté pour accueillir des handicapés
moteurs ou mentaux. Le bus a été aménagé avec des jeux et des instruments de
kinésithérapie. Il y a deux équipes de 5 personnes (agents communautaires,
physiothérapeute, kinésithérapeute) qui s’occupent de jeunes. Nous avons la
chance d’être intégrés pour quelques heures de disponibilité au service de ces
jeunes. Les filles ont particulièrement apprécié la joie des enfants mais aussi
ont été impressionnés par des moments de violence, toujours courts mais
intenses. Il faut alors isoler, punir et réconforter. Savant dosage !
Le lendemain, nous visitons le « Mother project », à quelques centaines de mètres du temple de
Kali (Kalighat). Ce projet initié par la Fondation et Mère Térésa propose des
classes de rattrapage aux jeunes en difficultés scolaires. Nous passons de
classe en classe. Augustin en profite pour faire le pitre. Ce soir-là, aucun
enfant n’a pu travailler !
Augustin rayonnant devant un auditoire tout acquis |
La Fondation Tomorrow
gère aussi, dans les locaux d’une école publique, un projet « Model class » qui s’adresse aux
jeunes très pauvres. En quelques années, et en suivant le curriculum du
ministère, la Fondation a mis au point une pédagogie adaptée et performante.
Nous pensons à nos propres expériences, avec Initiative Développement puis avec
ADEMA dans le Nord-Ouest Haïtien, l’école Pa
nou, initiée par Isabelle et Mausert.
Et toujours et encore le CNED
Chaque matin, nous travaillons le CNED, avec beaucoup
d’acharnement !
Le rythme est pris. Plus personne ne râle, malgré les
quelques négociations d’usage (« Papa,
aujourd’hui, pas d’évaluation, seulement trois matières, etc. » ou « Maman, après tu m’achèteras une
voiture », rajoute Augustin !).
Au cours de cette année, les plages horaires, consacrées au
CNED, se rétrécissent mois après mois à cause de toutes les opportunités de
découvertes et d’échanges qui se créent. Nous nous concentrons donc sur les
fondamentaux et sur les matières principales. Certaines matières, plus
« créatives » sont faites en groupe !
Chaque fille a ses préférences et surtout ses
blocages : la technologie n’enchante pas Maguelone (les notions de cahier
des charges ou de fonctions techniques et d’usage sont difficiles à transmettre
et à comprendre) ; Guillemette bloque sur l’orthographe française (les
filles ont régulièrement le droit à de longs monologues de papa sur la rigidité
de l’Académie française, arque boutée sur les règles, alors qu’une langue et
vivante et doit évoluer, « Bon, t’as
fini, papa,tu nous l’as déjà dit 10 fois, on peut s’y remettre ! ») ;
et Justine n’adhère pas aux sciences du vivant, pourtant si intéressantes.