Après une nouvelle nuit dans le train de
Kashgar, nous arrivons au petit matin à la gare de Lyuyang, le temps de trouver
un taxi collectif pour Dunhuang et d’acheter nos billets de train pour Beijing
dans quelques jours.
Lors de ce trajet de deux heures, dans un
paysage aride et lunaire, pour tuer le temps, nous jouons au « Best of »…
- Best of food…
- Best of lodging…
- Best of rencontres…
- Best of “galères”
- Best of homestay…
- Best of sports…
- Best of aventures…
- Best of “engueulades de papa”… (Si, si… 1.000 excuses à Philippe qui est dans le tiercé gagnant, en bonne place !). « Bon, on n’a pas pu en retenir seulement 10, il y en a eu trop et certaines monumentales ! ».
Nous vous tiendrons au courant dans un
prochain « post ». Juste
une amicale pensée à notre copine, Véro, notre Webmaster, maintenant à Dushanbe (« ne cherchez pas, c’est la capitale du Tajikistan ! »),
dans cette Chine qui nous censure et qui est dans le top 5 de presque toutes
les catégories (tandem à Dhaka, dîner de Noël, accueil, rencontre, trip en
bateau, projets de développement… et bien sûr Gabriel). Merci pour tout.
A notre arrivée à Dunhuang, malgré le fait que
nous avons réservé une auberge de jeunesse, fait confirmer par deux fois en
chinois, nous découvrons que cette auberge n’accueille pas les… étrangers.
En Chine, il est difficile de se faire
comprendre. Le langage des mains n’est finalement pas universel, même si les
tentatives paternelles ou maternelles (imaginez
les commander du poulet !) pour se faire comprendre font rire les
enfants et les locaux. De toute façon, c’est très rare d’avoir exactement, ce
qu’on a demandé… C’est la règle. Il faut être réactif et se contenter de ce qui
est proposé ! Bonne leçon de réalisme et d’humilité !
Intéressant aussi de voir ces régions reculées
chinoises qui résistent ainsi à la mondialisation et à son principal media
anglophone ! Bon avec les applications iPhone,
on arrive à trouver quelques termes de mandarin !
Qu’importe la Guest House où nous descendons
touche les dunes, dont la plus haute, au loin, culmine à 1.700 mètres
d’altitude. Vraiment impressionnant !
Dünhuang a longtemps été une oasis fertile sur
la Route de la Soie. Le lieu est réputé pour ses dunes, « Mont des sables chantants et son lac du
croissant de lune ». Mais là encore, il faut payer pour entrer dans le
désert ! En fait, tout est organisé pour le tourisme interne qui explose
et qui est très important en été : pédalo sur petit lac, caravanes de
chameaux pour approcher le sommet, ULM, surf sur sable, circuit de 4x4… On
voulait éviter cet endroit-là, mais impossible de franchir la grille de 2
mètres qui longe le désert !
Le lendemain de notre arrivée, nous allons
visiter les splendides et uniques grottes de Mogao, Patrimoine Mondial de
l’Humanité ! (« Si, si les
enfants ! » ; Mais papa, on en a gavé du Patrimoine Mondial de
l’Humanité », disent en cœur les filles ! « Y’en a marre des bouddhas », rajoute Augustin, un
peu malade).
Bon, il faut avouer que les enfants, réveillés
de bonne heure s’attendaient à des caves à escalader (« un truc whaou, quoi ! pas encore des
bouddhas qui dorment ! »… Finalement, on est pris en main pour
visiter ces chefs d’œuvres qui ont été préservés dans le temps. Nous avons droit
à une guide anglophone très cultivée.
Plus de 735 grottes ont été répertoriées. Les
principales sont peintes et sculptées. Ces caves datent de plus de 1.200 ans,
de l’époque où le bouddhisme tibétain s’était exporté jusqu’en Mongolie. Elles
étaient à l’abandon, depuis la conquête de Gengis Khan.
En 1900, un moine taoïste, « père
Wang », découvre une grotte murée et scellée, refermant plus de 50.000
manuscrits et peintures sur Soie. Elle avait été bouchée par des moines,
soucieux de protéger ces trésors. Hallucinant !
Malheureusement, le « père Wang » ne
se rend pas compte de sa découverte. Il offre ces manuscrits à des gens de
passage ou à des notables de la région. La nouvelle se répand et évidemment attire
les archéologues européens… Dans les années 1900, chacun vient se servir,
notamment un français Paul Pelliot et un anglais, Sir Aurel Stein. Les
collections françaises (Musée Guimet, Louvres, Bibliothèque Nationale) ou anglaises
sont plus riches que le Musée de Pékin… Les chinois nous le pardonnent
difficilement.
Le Musée Guimet, accueille notamment une
rarissime version nestorienne de L'Évangile
selon Saint-Jean.
La British
Library possède aussi un exemplaire du Soutra
de Diamant, texte bouddhiste, daté de l’an 868 et qui en fait le plus
ancien ouvrage intégral daté imprimé au monde : http://fr.wikipedia.org/wiki/Soutra_du_Diamant
Ces « emprunts » les ont
certainement sauvés des ravages de la Révolution
Culturelle, mais on ne peut s’empêcher de penser que c’est vraiment une
forme « d’extorsion culturelle ». A notre connaissance, il n’existe
pas encore de conventions internationales sur la protection des œuvres et chaque
puissance occupante a pris l’habitude de se servir. Il faut reconnaître que les
musées européens auraient beaucoup à perdre de devoir restituer certaines
œuvres volées, empruntées ou achetées à des prix dérisoires…
Seules quelques dizaines de grottes sont
ouvertes, à tour de rôle au public. L’an dernier, il y a eu plus de 800.000
visiteurs, principalement chinois, pour les grottes… Imaginez l’impact de cette
foule sur ces grottes qui n’accueillaient que 2000 moines, dans leur apogée, au
VII et Xème siècle !
Le plus grand et le plus haut « bac à sable »
pour les enfants…
Là où nous sommes, nos voisins immédiats sont
des chameaux que leurs propriétaires amènent en trottinant sur les sites
touristiques. On ne se lasse pas d’apprécier la dignité de ces animaux, le port
tellement droit et hautain de leur tête, le regard lointain et si distant. Leur
trot est vraiment majestueux !
Ernest Renan déclarait que le « désert était monothéiste »… Belle
formule, vraisemblablement exacte pour les contemplatifs ou les mystiques… De
notre côté, nous sentons une certaine lassitude des enfants, après plus de 15
jours dans ces paysages arides, qui rêvent de grands magasins, de grandes rues,
de grands buffets de nourritures… Il faut avouer que le sable, c’est comme
l’eau, rien ne l’arrête. Chaque heure, il faut retirer, inlassablement, la
couche de poussières de sable…
Mais, malgré cette fatigue, ils s’éclatent
dans les dunes, les dévalant à travers toutes sortes de figures et les
remontant à nouveau… C’est épuisant mais tellement drôle. Le sable est fin,
blanc et chaud. Le désert change de couleur, avec notamment ses ombres qui
évoluent, au cours de la journée. Edifiant !
Dünhuang, c’est aussi l’occasion pour nous
d’étendre notre visa. En effet, nous avons décidé de rester plus d’un mois en
Chine. Nous aimons cette Chine qui avance, calmement, sûre d’elle… Cette
opération d’extension de visa, présentée par tous et par tous les guides comme
simple et automatique, nous a donné des vraies sueurs froides…
Tout d’abord, nous perdons Maguelone, entre le
désert et la ville, pendant 2 heures, le temps de nous inquiéter sérieusement.
En fait, elle avait anticipé notre marche vers la ville ! A l’étranger,
l’angoisse irrationnelle vient vite !
Ensuite, il faut passer différentes étapes –
photo numériques en 4 heures, montage du dossier, à nouveau photo de la police,
informations manquantes – sans trop savoir le résultat final qui nous sera
communiquer que 24 heures plus tard…
Le lendemain, « il faut raccourcir les prénoms de vos filles car ça ne rentre pas dans
l’espace prévu par l’ordinateur ». Bon après négociation, ils ne gardent
que les premiers prénoms…. Puis il faut faire les collages sur les passeports…
entre les trois filles qui se ressemblent trop…
Les fonctionnaires et policiers ne parlent pas
l’anglais. Il faut donc passer par le mobile du proprio de la Guest House… Mais
il faut reconnaître, un très bon accueil et une réelle volonté de faire avancer
le dossier. La situation était épique et incertaine… Quel soulagement lorsque
nous récupérons nos passeports tamponnés… Une nouvelle étape administrative
stressante de franchie…Il nous reste donc le visa mongol puis le visa russe… On
nous promet déjà quelques aventures ! A suivre…
Papa repense à ces amis étrangers étudiants, principalement
africains, notamment son hôte comorien Hadji Selim Mzé, tellement stressés
lorsqu’ils devaient renouveler leur papier de séjour… alors qu’ils étaient en
règle. Qu’on se sent fragile et vulnérable devant ces obligations
administratives !
Notre dernière journée à Dünhuang est
consacrée aux dunes et à une petite promenade dans cet oasis. Le soir, nous nous offrons des pâtes ((« Papa, j’en ai marre de la nourriture chinoise », dixit Justine).
Dans la nuit au 24 au 25, nous montons dans le
train, à 2 h 24 du matin, en direction de Beijing… pour près de quarante heures
de voyage ferroviaire !